CHOW HOUND
(Traduction Française
du discours prononcé au cimetière national militaire d'Arlington (USA) les
23 et 24 août 2006 lors de l'inhumation de trois Aviateurs Américains, par
Michel Baudouin, Vice président de l'ANSA)
Certains peuvent être
étonnés de la présence d'un Français à cette cérémonie. En fait, je suis
venu en tant que représentant de l'ANSA (Association Normande du Souvenir
Aérien). D'autre part, j'avais 12 ans au moment du débarquement et je vivais en
Normandie. Aussi, jamais je ne pourrais oublier ce que les aviateurs Américains
ont fait à l'époque pour la libération de la France.
Ainsi que l'a mentionné Mr.
John Collins, notre Association a érigé plus de quarante stèles en Normandie.
Parmi elles, une est spécialement dédiée aux neuf vaillants membres d'équipage
de la Forteresse Volante Boeing B-17 " Chow Hound ".
Ce mémorial a été dévoilé le
8 août 2004, date anniversaire de la tragédie du Chow Hound, à Lonlay l'Abbaye,
petite ville de Normandie, en France.
La cérémonie, avait été
organisée conjointement par l'ANSA, le Maire et son Conseil Municipal ainsi que
par la section locale des Anciens Combattants et avec la participation du
Colonel Jeffry Jackson, Attaché de l'air près l'Ambassade Américaine en France,
de Madame Jackson, des Officiels Français et de la population du village et des
environs.
Revenant sur le crash
du Chow Hound, laissez-moi vous en relater les circonstances. Selon le rapport
officiel établi lors du retour à la base des autres équipages témoins du drame,
le 8 août 1944, à 13h10, l'avion volait en formation à l'altitude de 4.250
mètres. Il était chargé d'une trentaine de bombes anti-personnelles de 150 kg
chacune, destinées à attaquer la ligne de front Allemande par l'arrière car
l'ennemi, offrait alors au sud de Caen, une résistance farouche aux troupes
Canadiennes et stoppait leur progression.
Sitôt le franchissement de
la partie libérée, les Allemands ouvrirent le feu avec leur DCA équipée de
canons de calibre 88. On suppose qu'un obus atteint le bombardier de plein
fouet, sectionnant la queue de l'appareil. Devenu incontrôlable, l'avion partit
en vrille. C'est alors qu'une aile puis un moteur se détachèrent du fuselage,
avant que l'appareil plonge vers le sol pour s'embraser, les bombes éclatant
sous l'effet de la chaleur.
Ce fut si soudain que
les membres d'équipage n'eurent pas le temps d'évacuer l'avion et de sauter en
parachute. Il n'y eût aucun survivant parmi les neuf occupants. Le mitrailleur
de queue fut retrouvé encore attaché à son siège.
C'est sur le territoire de
la commune de Lonlay l'Abbaye que l'avion fut abattu. Abbaye signifie " Abbey "
en Américain. C'est un village bâti au Moyen-Âge où les moines édifièrent un
monastère. A l'heure actuelle seule la vieille et magnifique église subsiste et
reste ouverte au culte.
Lors de la libération de
la ville par l'armée Américaine, quelques jours plus tard, les corps des
aviateurs, enterrés par les Français, furent relevés et transférés dans les
cimetières militaires Américains: quatre à Saint-James et deux à Saint Laurent
sur Mer. Aux dires des témoins, les restes de trois aviateurs se trouvaient
encore au bout d'une soixantaine d'années, toujours prisonniers dans
l'enchevêtrement des tôles de l'épave.
L'ANSA prit contact avec les
Autorités Américaines qui déléguèrent sur le site, une équipe spécialisée
d'Hawaii dont une anthropologiste. Après avoir creusé, ils exhumèrent des
ossements qui purent être identifiés avec certitude grâce à l'ADN de parents
encore vivants. Nous avons la satisfaction du devoir accompli que ces trois
aviateurs, portés jusqu'à présent disparus, ont trouvés désormais la
sépulture qu'ils méritaient dans leur Patrie.
Quelques mots au sujet du
bombardier " Chow Hound ". Il appartenait à la 322ème escadrille, 91ème
Groupe de bombardement, 8ème Air Force. Il avait décollé d'un aérodrome du
sud-est de l'Angleterre.
Le Chow Hound était renommé
dans l'Armée de l'Air Américaine car il avait acquit une longue histoire.
C'était probablement à l'époque, la plus ancienne Forteresse Volante encore en
service. La politique de l'Etat-major était telle qu'un équipage était assigné
pour vingt cinq missions de guerre. Au moment du crash, le Chow Hound en était à
son troisième équipage.
L'ANSA a retrouvé et
sauvegardé le " nose art " comportant encore la signature de l'artiste
(c'est-à-dire le dessin artistique et parfois humoristique peint sur le nez de
l'appareil, du coté gauche). Chaque avion se caractérisait par un dessin
différent. Il paraît difficile de traduire Chow Hound. Dans le langage populaire
et argotique on serait tenté de dire " Chien Morphal " ! Cette pièce unique a
certes souffert dans l'écrasement de l'avion mais reste malgré tout présentable.
Nous sommes en pourparlers pour en faire donation à un musée Américain, ainsi
qu'une mitrailleuse provenant de cet appareil.
La France a été libérée du joug nazi par les troupes
Alliées et nous sommes redevables d'une dette envers ces courageux aviateurs.
Nous nous souviendrons encore longtemps que de jeunes Américains volontaires
comme ceux de l'équipage du Chow Hound, ont fait le sacrifice de leur vie, loin
de leur Patrie pour notre Liberté.
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